PRÉNOM

Les mineurs cisgenres choisissent parfois de changer leur prénom d’usage, par exemple en utilisant un diminutif ou leur deuxième ou troisième prénom. Cela ne pose pas de problème pour les établissements, mais quand un·e élève trans choisit de changer de prénom pour vivre en accord avec son identité de genre, l’administration s’oppose parfois à ce choix.

Cette différence de traitement tombe sous le coup de l’article 225-1 du Code pénal. Il est en effet discriminatoire d’autoriser un élève cisgenre à se faire appeler par son prénom choisi pour des raisons de convenance personnelle mais de ne pas autoriser un autre élève à se faire appeler par son prénom choisi au motif que ce prénom est ou serait lié à son identité de genre.

CIVILITÉ

La procédure de changement de prénom est ouverte aux mineur·e·s, contrairement à celle de changement d’état-civil. Cependant, le Défenseur des droits a exprimé à plusieurs reprises (MLD -2012-22 du 28 mars 2012 et MLD-2015-228 du 6 octobre 2015) que le fait de persister à mégenrer une personne trans constituait un délit de harcèlement moral. Il en découle que l’établissement scolaire doit respecter la civilité demandée par chacun·e.

RECOMMANDATIONS DU MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE

Le 30 septembre 2021 est paru au Bulletin Officiel de l’Education Nationale la circulaire intitulée « Pour une meilleure prise en compte des questions relatives à l’identité de genre en milieu scolaire ».

Cette circulaire s’applique aux établissements du primaire et du secondaire et précise auprès des équipes pédagogiques qu’il est important de modifier les prénom et pronom des élèves en exprimant la demande. Elle ajoute qu’il est également pleinement envisageable d’accepter les élèves trans dans les vestiaires, dortoirs et autre équipement genré selon l’identité de genre de l’élève, y compris avant qu’il ait pu effectuer des changement sur son état-civil.

Elle ajoute qu’en cas d’hostilité des parents vis à vis de l’enfant, il convient d’ouvrir le dialogue avec la famille dans l’intérêt de l’élève, et préconise en cas de danger de transmettre une information préoccupante à la cellule départementale de recueil des informations préoccupantes (Crip) ou de faire un signalement judiciaire auprès du parquet des mineurs.

Par ailleurs, dans le cadre de la campagne « Prevenir l’homophobie et la transphobie à l’école », le Ministère de l’Éducation Nationale précise dans le guide d’accompagnement de cette campagne à destination des collèges et lycées que « refuser le prénom d’usage d’une personne trans et/ou refuser d’utiliser les pronoms/accords correspondant à son identité » est un exemple « d’agissement LGBTphobe ».

Ces recommandations permettent d’agir contre des élèves qui harcèleraient un·e ou plusieurs élèves trans, et également contre le personnel éducatif et administratif s’il refuse d’accepter les prénoms et pronoms demandés par une personne trans.

Source :

Campagne
Livret

MODIFICATION DES DOCUMENTS NON-OFFICIELS

Les documents officiels scolaires, comme les diplômes et bulletins de notes, ne peuvent pas mentionner le prénom choisi des élèves trans : « Il est expressément défendu à tous fonctionnaires publics de désigner les citoyens dans les actes autrement que par le nom de famille ; les prénoms portés en l’acte de naissance. » (Loi du 6 fructidor an II – 23 août 1794)

En revanche, les prénoms peuvent figurer sur des documents non-officiels, comme les listes d’appel. Cela facilite grandement l’intégration des élèves trans et leur permet de se concentrer sur leurs études sans subir de discrimination de la part de l’établissement.

Le site SVT Égalités, créé par des professeurs français dans le but de « promouvoir un enseignement des sciences de la vie et de la Terre qui soit plus égalitaire et moins normatif », recommande que « l’équipe pédagogique soutienne la personne [l’élève trans ; ndlr], et ce de façon très concrète : en facilitant le changement de prénom dans les documents courants, en utilisant systématiquement le bon genre pour s’adresser à elle, mais aussi en parlant d’elle, même en son absence ».

Plusieurs chercheurs préconisent également le respect de l’usage du prénom choisi, l’accompagnement des élèves trans et la sensibilisation de leurs camarades et du personnel scolaire, vu que « l’expérience scolaire est perçue comme « mauvaise » ou « très mauvaise » pour 72 % des jeunes trans ».

La décision n°18-21 du 18 septembre 2018 du Défenseur des Droits va dans le sens du respect des souhaits des personnes trans : « Le Défenseur des droits recommande aux chefs d’établissement scolaire et d’enseignement supérieur de permettre aux mineur·es et jeunes transgenres de se faire appeler par le prénom choisi, d’employer les pronoms correspondants (féminins, masculins ou non-binaires), et de respecter les choix liés à l’habillement, et en prenant en considération leur identité de genre pour l’accès aux espaces non mixtes existants (toilettes, vestiaires, dortoirs). »

Il y a aussi plusieurs précédents dans l’enseignement supérieur. Les universités d’Aix-Marseille (www.univ-amu.fr/fr/public/utilisation-du-prenom-et-de-la-civilite-dusageamu), Rennes 2, Toulouse Jean Jaurès, Nanterre, IEP Paris, Paris 1, l’ENS Paris (Prénom d’usage à l’université, campagne contre la transphobie), Paris 8, Caen Normandie, Tours, Lille, Lyon 1, Lyon 2 et l’ENS Lyon permettent à leurs étudiant·e·s de changer de prénom sur simple demande. Depuis la rentrée 2019, les étudiant·e·s peuvent s’inscrire sous leur prénom choisi dans les logiciels de l’État.

Sources : Observatoire des Transidentités – La transphobie en milieu scolaire

HOSTILITÉ DES PARENTS

Nous avons abordé ci-dessus les devoirs relatifs au respect d’un élève trans par les établissements scolaires. Nous sommes néanmoins régulièrement contacté·e·s à l’inverse par des établissements désemparés qui désirent soutenir un·e élève trans, mais dont les parents s’opposent farouchement à ce que celle/celui-ci soit respecté·e dans son identité.

L’idéal, évidemment, est d’arriver à nouer un dialogue avec les parents afin de leur faire comprendre l’importance de respecter leur enfant pour qui il/elle est réellement.

Chrysalide propose des groupes de dialogue spécifiquement destinés aux proches de personnes trans pour leur permettre d’échanger avec d’autres personnes étant dans des situations similaires.

Nous avons également créé la brochure « Les transidentités et les proches » afin d’aider l’entourage à mieux comprendre la transition d’une personne trans. De façon générale, une association trans peut servir de médiatrice.

Si les parents persistent à refuser les désirs de leur enfant, il est important de réaliser qu’il/elle est potentiellement en danger au sein de sa famille et que ce refus témoigne uniquement de la partie des violences dont il/elle peut être victime.
L’établissement scolaire est autorisé à transmettre une information pour situation préoccupante afin qu’une évaluation soit faite et que le juge des enfants soit saisi en cas de danger avéré (art. L226-2-1 du Code de l’Action Sociale et des Familles).

L’établissement peut également conseiller à l’élève trans de saisir elle/lui-même le juge des enfants par courrier afin de lui faire part de sa situation. Il peut cependant être psychologiquement compliqué pour un·e mineur·e d’effectuer cette démarche.
Dans tous les cas de figure, rien ne s’oppose, même en cas de désaccord des parents, à ce que l’établissement nomme l’élève oralement comme il désire être nommé. Il est même précieux en cas de maltraitance familiale que l’élève puisse bénéficier d’un soutien au sein de son établissement scolaire.

Enfin, l’élève concerné·e ou tout témoin des violences qui lui sont infligées (y compris les enseignant·e·s) peuvent saisir le Défenseur des droits, que ce soit pour dénoncer les discriminations subies au sein de l’établissement ou pour signaler le non-respect des droits de l’enfant par ses parents.